Dans une interview télévisé accordée, mardi soir, 1er février 2011, Farhat Rajhi, nouveau ministre de l’Intérieur au sein du gouvernement interimaire, a tenu pour la première fois depuis la chute de la dictature un discours en rupture avec la langue de bois dont les tunisien ont eu l’habitude d’entendredu gouvernement jusqu’à présent. Des propos marqués par l’audace, la transparence et le franc parler, le tout dans un langage dialectal accessible à tous les citoyens. Une première du genre !
Plusieurs révélations de la plus haute importance ont été faites à cette occasion. On mentionnera, d’abord, l’arrestation de l’ex-ministre de l’Intérieur, Rafik Haj Kacem, déjà en résidence surveillée, et sa mise en garde à vue de trois jours, renouvelables, pour répondre de graves soupçons qui pèsent sur lui.
Ce qui s’est passé hier au ministère de l’Intérieur est digne d’un film hollywoodien, la journée exceptionnellement dangereuse vécue, le lundi 31 janvier 2011, par le ministre de l’Intérieur et le général Rachid Ammar, chef d’état major de l’armée de terre, au sein des locaux du département de l’Intérieur où ils ont été attaqués par une horde de deux à trois mille personnes se disant faire partie des forces de sécurité. « Hier, le Général et moi, avons fui par miracle, si ce n’étaient pas les unités anti-terroristes, ils nous auraient tué« , a dit le ministre, qui s’est fait voler lors de cette attaque son manteau, ses lunettes et son portable.
M. Rajhi assure qu’il s’agissait bel et bien d’un complot contre l’Etat et le gouvernement transitoire et qu’il n’a dû son salut, avec le général Ammar, qu’à un miracle à un point tel qu’il n’a pensé qu’à sauver sa peau. Il est parti sans son manteau, ses lunettes et son portable. Lunettes et portables qui lui ont été dérobés !
Il fallait voir les assaillants dont plusieurs étaient armés et surexcités avec une mine de drogués et d’ivrognes, « Ils étaient armés, ivres et drogués » précise le ministre. Or, ces bandes de deux à trois mille personnes ont disparu et se sont répandus à travers tout le pays pour semer la terreur parmi les populations, ce qui explique l’état de terreur qui a régné sur plusieurs régions du pays tout le long de la journée de ce mardi 1er février 2011.
Et dire que le directeur général de la sûreté nationale n’a arrêté personne. Après avoir informé le ministre qu’une cinquantaine d’assaillants avaient été retenus, il est revenu pour annoncer qu’il les a laissé partir sans même enregistrer leurs identités! Du coup, assure le ministre de l’Intérieur, il a compris que le mal vient de l’intérieur même de son département et que ce sont les directeurs centraux et généraux qui tirent les ficelles, d’où sa décision, en fin d’après-midi de cette même journée, de limoger et de mettre à la retraite anticipée 42 hauts responsables dont le directeur général de la Sûreté nationale.
Une dépêche de la TAP , citant une source autorisée auprès du ministère de l’Intérieur indique à ce sujet, qu’il a été procédé, mardi à la mise à la retraite d’office de 27 responsables sécuritaires et de 7 autres à la retraite ainsi que la nomination de 7 nouveaux directeurs à la tête de plusieurs secteurs de la sûreté nationale.
Depuis son arrivée au gouvernement, M. Rajhi avoue avoir eu plusieurs bâtons dans les roues. Plusieurs de ses ordres n’ont pas été exécutés par ces hauts responsables ces derniers jours. Pour qui travaillaient-ils ? Pourquoi cette insubordination ? A quelle fin ? Autant d’éléments qui seront révélés, sans doute, par les enquêtes en cours.
Farhat Rajhi a néanmoins indiqué que les même personnes qui ont attaqué le ministère de l’Intérieur sont lâchées dans la nature, ont sévi aujourd’hui dans tout le pays et ont semé la panique. Il a reconnu l’existence d’une défaillance sécuritaire dans le pays, en prévenant contre la propagation de l’intox, démentant des cas de kidnapping dans le pays. Une source du ministère, citée par la TAP, a démenti, à ce titre, « les rumeurs mensongères propagées au sujet de l’enlèvement d’enfants dans certains établissements éducatifs, des informations dénuées de tout fondement, à l’exception d’un cas unique d’un jeune âgé de 16 ans. Les investigations ont montré que ce jeune a été repéré dans l’une des villes côtières et qu’il est réputé pour ses absences répétées de l’école rendant plausible l’hypothèse de sa fugue et non de son kidnapping ».
Pour revenir à la défaillance sécuritaire, le ministre l’a expliqué par le fait que des postes de police ont été brûlés et d’autres ont été désertés. Par ailleurs, il existe actuellement 10 mille prisonniers qui ont fui les prisons, le problème c’est que ces prisonniers même s’ils sont ramenés, on n’a pas où les mettre, car la plupart des prisons ont été détruites, brulées, a indiqué le ministre, qui ignorait que son collègue de la justice a appelé les prisonniers qui se sont évadés pendant la révolution de rejoindre la maison d’arrêt ou le poste de police le plus proche pour régulariser leur situation.
L’autre annonce faite par M. Errajhi touche au prochain mouvement au sein du corps des gouverneurs et qui touchera les 24 gouvernorats du pays, sachant que près de dix gouverneurs sont, déjà, absents de leurs postes.
Le ministre de l’Intérieur a lancé un appel, durant cette interview, à toutes les troupes pour rejoindre leur poste de travail dès demain. Il a annoncé la révision à la hausse de leurs primes de nuit et son accord pour la création d’un syndicat. Les propos du ministre de l’intérieure ont laissé entendre qu’une grand partie du corps de la police n’ont plus rejoint leur fonction disant que dans un gouvernorat comme Kebili il n’existe plus aucun agent en uniforme jusqu’à présent.
Interrogé sur la police politique, le ministre a indiqué qu’il n’a pas encore ouvert ce dossier puisqu’il n’est à ce poste que depuis cinq jours. (Synthèse 01/02/2011)
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