Je suis certain que l’histoire retiendra Mohamed Ghannouchi, non par pour ce qu’il a fait depuis 12 ans comme premier ministre, mais pour ce qu’il a eu le courage de faire aujourd’hui, en décidant de sortir de la magouille constitutionnelle dans laquelle certains ont voulu mettre la Tunisie dès sa première journée de liberté. Il vient de nous faire franchir le premier pas dans la nouvelle ère. Il ne s’agit pas de choisir qui est le meilleur entre le premier ministre et le président de la chambre des députés, deux citoyens tunisiens que l’histoire a chargés de lourdes responsabilités, et qui ont le devoir de les assumer. Le premier de ces devoirs a été de donner au pays un signe clair de référence du pouvoir dans cette phase transitoire, ce pouvoir ne peut se référer qu’à la constitution et au respect du droit.
L’hésitation a fait de la Tunisie, qui n’a connu que deux présidents pendant plus d’un demi-siècle, un pays qui voit se succéder au pouvoir trois présidents en moins de 24 heures. On peut voir les répercussions de cette indécision dans la rue aujourd’hui. Un pays désemparé, totalement paralysé, sur lequel la peur et l’incertitude planent. Je suis sorti faire un tour aujourd’hui dans quelques quartiers des bons lieux, et je remercie dieu d’avoir pu revenir chez moi… Je n’ai vu que du chaos et des milices qui commencent à s’installer pour prendre possession de nos rues, installant leurs barrages et périmètres de sécurité.
La contestation a eu raison de la dictature. C’est un fait sur lequel on doit aujourd’hui commencer à bâtir. Le régime du 7 novembre est tombé mais l’Etat doit avoir l’énergie et la clairvoyance nécessaires pour assurer la continuité. Il ne s’agit pas de continuer à assurer l’exécution des promesses de l’ancien dictateur, ni d’agiter ses fantasmes de défis, il doit être clair que ce régime est mort et que chacun comprenne qu’il n’exprime que sa propre opinion. Cette course frénétique à l’apparat sur nos écrans, comme sur chaine étrangères, doit prendre fin. Vous faites peur aux tunisiens et vous ne contribuez pas ainsi à redonner confiance au pays.
Autant j’appelle ceux qui ont le pouvoir aujourd’hui à se limiter à assurer le nécessaire, comme déployer nos soldats dans les rues, autant j’appelle les tunisien à revenir à leurs vacations ordinaires. Commerçants, entrepreneurs, ouvriers, employés, aidez votre pays en reprenant le cours normal de votre vie!
Lundi notre pays doit commencer à vivre pleinement sa nouvelle ère.
Le nouveau pouvoir ne peut commencer à s’installer que dans deux mois. Ces deux mois ne sont pas indispensables à tous ces politiciens empressés qui n’attendent que le meilleur moment pour l’occuper. Ils le sont pour vous, parce que cette fois, dans l’histoire millénaire de votre pays, c’est vous qui allez choisir ceux qui vont vous gouverner. C’est de votre choix que dépendront les réformes que vous attendez, ainsi que l’avenir de votre pays. La principale responsabilité de ce gouvernement transitoire est de vous assurer l’accession à la souveraineté, et chaque voix pèsera son poids.
Nous avons tous besoin de confiance, nous avons tous besoin d’espoir, unissons tous pour instaurer les conditions nécessaires à l’obtention de cette confiance et de cet espoir.
Yahyaoui Mokhtar – Tunis 15 janvier 2011
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